• Niels Högel, «l'infirmier du diable» accusé d'une centaine de meurtres

    Niels Högel, «l'infirmier du diable» accusé d'une centaine de meurtres

    Le procès de cet ancien soignant s'ouvre ce mardi à Oldenbourg, dans le nord de l'Allemagne. Il est accusé d'avoir tué 99 patients par «ennui» en leur administrant des doses mortelles de médicaments.

    «Le pire meurtrier d'Allemagne depuis Hitler» ; «l'infirmier du diable» , «le serial killer à la piqûre». La presse Outre-rhin n'a pas encore trouvé de qualificatif assez fort pour définir les méfaits de Niels Högel. Difficile d'imaginer que cet homme brun, au visage poupin et au regard désormais abattu a pu mettre fin à la vie de plusieurs dizaines de personnes entre 2000 et 2005. L'arme de ses crimes? Les seringues, avec lesquelles il injectait des doses mortelles de médicaments pour achever des malades déjà mal en point. Déjà condamné à perpétuité en 2015 pour un double meurtre et quatre tentatives, il doit répondre de ses actes à partir de ce mardi devant le tribunal d'Oldenbourg, au nord de l'Allemagne. Pas moins de vingt-quatre jours d'audience, étalés jusqu'au 17 mai 2019, sont prévus par le parquet. Retour sur le parcours d'un tueur en série hors du commun.

    Il voulait cesser de s'ennuyer. Briser la monotonie. Prendre le contrôle de la vie de ses patients. Les mettre en danger, pour montrer ses qualités de soignant. Puis les laisser mourir. Ce schéma, Niels Högel l'a reproduit plusieurs dizaines de fois sur des innocents. Dès mardi, il sera jugé pour le meurtre de 99 personnes. Mais, selon la police, il pourrait avoir plus de 180 meurtres à son actif. «Il y en a au moins autant qu'on ne peut pas prouver», commentait, impuissant, le policier en charge de l'enquête, Arne Schmidt. À Oldenbourg, les forces de l'ordre ont mis fin en août 2017 à près de douze ans d'investigations. L'opération avait été baptisée «Kardio» (cardiovasculaire en français), car Högel injectait des surdoses de médicaments à ses malades lorsqu'ils étaient en réanimation. Au total, plus de 800 cas ont été analysés, 200 ont été considérés comme suspects, donnant lieu à 134 exhumations. À côté de ça, des centaines de témoins ont été interrogés. Une affaire «unique dans l'histoire de la République fédérale», ont conclu les autorités. «J'espère qu'une culpabilité sera prononcée dans chacun des cas pour que les proches puissent enfin terminer leur deuil», a déclaré Petra Klein, de l'association d'aide aux victimes Weisser Ring, à la veille du procès.

     

    «Tromper l'ennui»

    Né le 30 décembre 1976 à Wilhelmshaven, ville portuaire de Basse-Saxe, Niels Högel était un enfant apprécié, drôle, sympathique. Il ne correspond en rien au stéréotype du tueur en série, potentiellement renfermé sur lui-même, timide, voire rejeté par ses camarades. Le jeune homme voulait devenir médecin mais ses résultats à l'école étaient insuffisants. Après quelques stages à l'hôpital de sa ville de naissance, il entame une formation d'infirmier à l'âge de 17 ans. Comme son père. Dès son adolescence, le jeune homme développe un affect particulier pour les situations d'urgence. En 1999, il rentre tout naturellement à l'unité de soins intensifs de l'hôpital d'Oldenbourg. En chirurgie cardiaque.

    Selon les enquêteurs, c'est à cette époque-là qu'il prend conscience de la mort. Son père fait un arrêt cardiaque. Une de ses amies décède. Affecté moralement par ces tristes évènements, il commence à prendre des anxiolytiques pour calmer son stress. Au travail pourtant, tout se passe pour le mieux. Ses collègues le félicitent, le trouvent appliqué, généreux dans l'effort. Puis au bout de quelque temps, il commence à agacer. Car Niels Högel aime se mettre en avant, quitte à provoquer l'ire de ses collègues. La situation se corse quand sa femme, une praticienne du même établissement, le quitte. Convoqué par ses supérieurs, Högel est contraint à quitter l'hôpital d'Oldenbourg. Il accepte sans rechigner. Comme cadeau de départ, il bénéficie d'une lettre de recommandation, saluant son travail consciencieux, soigneux et sa faculté à «coopérer» dans des «situations critiques».

    Durant les trois ans passés par Högel à l'hôpital d'Oldenbourg, le nombre de personnes décédées dans le service de chirurgie cardiaque a augmenté de 58%. Et si certains collègues le suspectaient d'avoir un comportement anormal, aucun d'eux n'a transformé ses soupçons en actions concrètes. Aucun mécanisme interne n'a donné l'alerte. En somme, d'après les enquêteurs, «personne n'a voulu assumer ses responsabilités». «On se doutait de quelque chose mais on n'a pas voulu alerter les autorités pour ne pas nuire à cet établissement privé», indique au Figaro l'écrivain Stéphane Bourgoin, spécialiste des tueurs en série. Et pourtant, l'infirmier a commis ses premiers meurtres dans cet établissement. Principalement pour «démontrer ses compétences en matière de réanimation vis-à-vis de ses collègues et chefs et pour tromper l'ennui», selon la police. Son mode d'action était simple: injecter de fortes doses de Gilurytmal, un médicament pour réguler l'arythmie cardiaque ou traiter la tachycardie. Ses victimes n'avaient pas de profil spécifique: celles-ci étaient âgées de 34 à 96 ans. Il n'avait pas de «préférence» de sexe, selon les enquêteurs. Seul point commun, les personnes visées étaient des patients dans un état très critique.

     

    Pris sur le fait

    En décembre 2002, Högel est embauché à l'hôpital de Delmenhorst, entre Brême et Oldenbourg. Ses méfaits s'intensifient. Lors de son expertise psychiatrique, il racontera notamment le meurtre de Brigitte, une femme de 61 ans. Cette patiente, gravement malade, était incapable de bouger: Niels Högel lui a administré trois doses de Gilurytmal, provoquant la mort de la sexagénaire en quelques minutes. «Le suspect n'arrive pas à se souvenir de chaque cas. Mais dans plus de trente cas, il se rappelait concrètement des patients et de leur comportement», relevait Daniela Schiereck-Bohlmann, procureur principal d'Oldenburg.

    Les chiffres sont édifiants. En 2000, soit deux ans avant l'arrivée de Niels Högel, 76 personnes sont décédées à l'hôpital de Delmenhorst. En 2003, 177 personnes y ont perdu la vie, puis 170 en 2004. Les enquêteurs ont également constaté une forte augmentation de la consommation de Gilurytmal, le médicament favori de «l'infirmier du diable». Cinquante ampoules ont été utilisées en 2002, puis 225 en 2003 et 380 en 2004. Après le départ du tueur en série, le nombre de décès est brusquement redescendu. Même chose pour l'utilisation des ampoules mortelles. «Ce que nous avons pu apprendre est effrayant, cela dépasse tout ce que l'on aurait pu imaginer», avait assuré Johann Kühme, chef de la police d'Oldenbourg, en août 2017.

    Les sévices du meurtrier ont pris fin lorsqu'une de ses collègues l'a surpris en train d'administrer une dose mortelle à un patient, en juin 2005. Cette erreur lui avait valu en 2008 sa première condamnation pour tentative de meurtre. Alertée par la médiatisation de ce premier cas, une femme avait exprimé des doutes quant au décès de sa mère. Plusieurs corps avaient été exhumés et les enquêteurs avaient trouvé des traces de substances suspectes chez cinq d'entre eux, concluant dans trois cas à des injections mortelles et dans les deux autres à une «cause possible» de la mort. Dans cette affaire, Högel a écopé en 2015 d'une peine de prison à perpétuité.

    Mais en janvier 2014, l'ex-praticien avoue une cinquantaine d'homicides à son compagnon de cellule. Ces aveux ont relancé l'enquête, qui s'est révélée tentaculaire. Régulièrement, la presse allemande d'abord, européenne ensuite, ont relayé les avancées des forces de l'ordre en termes de chiffres: Niels Högel aurait d'abord tué 33 personnes, puis 50, puis 84, puis... 99. Lors d'une conférence de presse en août 2017, les enquêteurs avaient admis leur impuissance. Malgré leurs efforts, il restait difficile de déterminer à chaque fois si l'ex-soignant était bien à l'origine de la mort de ses patients. Le procureur d'Oldenbourg, Thomas Sander, s'était même questionné: «Qui sait combien de crimes pourront encore être identifiés?». Dès mardi, pas moins de 126 proches, portés partie civile, assisteront à la première audience du tueur.

    Le Figaro.fr


  • Commentaires

    1
    Mardi 30 Octobre 2018 à 16:59

    ici  encore,  c' est le pas de vague qui a permis  à ce fou  meurtrier de commettre tant de meurtre !

    Bizarre quand même que personne ne s' inquiétait de la disparition de ces ampoules mortelles !

    Un homme qu' on devrait  piquer

    2
    Rakia
    Mardi 30 Octobre 2018 à 17:03

    “ Tromper l’ennuie "plus débile que ce motif,tu meurs !

    Tuer 99 patients et patientes pour passer le temps ,même Satan ne fera 

    pas mieux,un criminel diabolique qui n’a pas sa place parmi les humains !

    Que justice soit faite pour les victimes et leurs familles !

    3
    fripouille
    Mardi 30 Octobre 2018 à 17:51

     Toutes les armoires à pharmacie dangereuse sont sous clé, et chaque utilisateur doit signer un bon de sortie.

    4
    françoise
    Mardi 30 Octobre 2018 à 18:19

    A croire qu'il y a eu du laissé faire ,ce n'est guère envisageable autrement ! C'est impensable de prendre connaissance de ce triste nombre de victimes ,il se procurait bien le médicament à la pharmacie de l’hôpital ?Il y a quand même un laissé aller de la part de ses supérieurs !

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