• Procès Tapie: échanges tendus entre le parquet et Stéphane Richard

    Procès Tapie: échanges tendus entre le parquet et Stéphane Richard

    © AFP/Archives - Martin BUREAU Stéphane Richard

    Le PDG d’Orange était convoqué à la barre du tribunal correctionnel mercredi dans le cadre de l’affaire Adidas-Crédit Lyonnais. Il est poursuivi pour complicité d’escroquerie et de détournement de fonds publics.

     

    "Je ne sais pas si c’est vous qui essayez de me faire passer pour un demeuré..." Il aura fallu attendre les questions insistantes du procureur hier en fin d’après-midi pour voir Stéphane Richard sortir de ses gonds. Durant les quatre heures d’audience précédant cette séquence, le PDG d’Orange, très bien préparé, avait pourtant livré une prestation toute en maîtrise, s’appuyant sur quelques notes et extraits du volumineux dossier d’instruction de l’affaire Adidas-Crédit Lyonnais.

     

    Après les auditions des principaux prévenus Bernard Tapie et son avocat Maurice Lantourne, l’ancien directeur de cabinet de la ministre Christine Lagarde était convoqué à la barre pour se défendre face aux accusations de complicité d’escroquerie et de détournement de fonds publics qui pèsent sur lui: les juges lui reprochent d’avoir facilité la mise en place d’un arbitrage désormais considéré comme frauduleux, qui a permis à l’homme d’affaires de récupérer plus de 400 millions d’euros.

    Des accusations lourdes

    Flashback. En 1993, Bernard Tapie mandate une banque publique, le Crédit Lyonnais, pour l'aider à vendre Adidas. L'équipementier est cédé pour 315 millions d'euros à un groupe d'acheteurs incluant le Lyonnais, puis revendu plus du double un an après. Tapie assure qu'il s'est fait flouer par la banque et se lance dans une guérilla judiciaire. Il croit gagner en 2005 lorsque le CDR, l'organisme public gérant le passif du Lyonnais, est condamné à lui verser 135 millions. Mais la Cour de cassation invalide l'arrêt.

    Puis, après l'élection de Nicolas Sarkozy, que Tapie a soutenu, Bercy décide de recourir à un tribunal arbitral privé pour mettre fin au conflit. Un choix qui va s'avérer désastreux pour le contribuable et pousser des députés à porter plainte. Depuis, les juges chargés de l’enquête affirment que l’arbitrage a été bidonné et accusent Stéphane Richard d’avoir agi "délibérément et de manière systématique et clandestine dans le sens des intérêts de la partie Tapie", afin de plaire à l’Elysée où l’homme d’affaires avait ses entrées.

    Des amis encombrants

    Certes, Richard ne fréquentait pas Tapie avant son arrivée à Bercy, il dit n’avoir dîné avec lui qu’à une reprise avec lui chez un ami commun. Mais la présidente du tribunal insiste sur ses liens avec  les autres protagonistes suspectés d’avoir aidé l’homme d’affaires. En premier lieu, le principal absent de ce procès, Nicolas Sarkozy, avec qui il entretient "une relation amicale" depuis 1995. A l’époque, ce dernier est avocat et intervient sur un dossier immobilier de la Compagnie générale des eaux, pour laquelle travaille Richard. Mais il assure n’avoir jamais parlé du dossier avec lui, tout comme avec Gilles August, l’avocat du CDR. Un ami "intime", témoin de son second mariage, qu’il a connu en 1991 lorsqu’il était au cabinet de Dominique Strauss-Kahn.  

    C’est également dans les années 1990 que Stéphane Richard s'est rapproché de Jean-Louis Borloo via un autre ami commun, Henri Proglio, futur patron de Veolia. C’est à Jean-Louis Borloo qu’il doit sa nomination comme "dircab" à Bercy en mai 2017. Il n’a beau rester qu’un mois à la tête du ministère de l’Economie, Borloo, compagnon de route historique de  Tapie, trouve tout de même le temps de présenter les deux hommes un dimanche matin, dans une annexe de Bercy. Si Richard ne se souvient plus très bien s’ils ont parlé de l’affaire. il assure encore une fois qu'ils n'ont pas parlé de la mise en place d’un arbitrage.

    La "voix" de sa ministre

    Toujours est-il que Richard va bien s’occuper personnellement du dossier après la nomination de Christine Lagarde à Bercy. Mais, il va s’employer, tout au long de l’audience, à limiter la portée de son rôle comme directeur de cabinet n’ayant, en théorie, aucune autorité hiérarchique sur les directeurs d’administrations et d’établissements publics. "Un rôle ingrat" consistant à n’être que la "voix" de sa ministre. Loin d’une quelconque  connivence avec la partie Tapie, il jure s’être uniquement appuyé sur les analyses de l’Agence des participations de l’état (APE) pour se faire un avis et éclairer les choix de sa patronne.

    Pourtant, l’APE s’est opposée avec constance à la solution de l’arbitrage, comme lui rappelle la présidente. Richard rétorque qu’elle a pointé des risques auxquels il a pris soin de répondre en posant comme conditions la désignation d’un collège d’arbitres et la fixation d’un plafond limitant les demandes financières de Tapie. Et il ajoute, de manière contradictoire, qu’un directeur de cabinet n’est pas tenu de suivre aveuglément les avis de ses services. Sa défense risque cependant d'être mise à mal par le témoignage de Bruno Bezard, le patron de l’APE, attendu pour le 28 mars. Car ce dernier, ancien camarade de l’inspection des finances, accuse l'ex-dircab' de lui avoir donné des instructions orales pour mettre en œuvre l’arbitrage. Ce que conteste Richard, qui dit s’être contenté de transmettre la position de la ministre et les orientations du gouvernement.

    "Un costume un peu trop grand"

    La présidente lui demande ensuite sa réaction lorsque la sentence arbitrale est prononcée. Devant les montants faramineux accordés à Tapie, Richard assure avoir été "déçu", "choqué", "attristé", concède une "défaite" pour l’Etat et le contribuable. Il dit aussi s’être immédiatement posé la question d’un possible recours contre l’arbitrage. Une option qui sera pourtant rapidement écartée par le gouvernement. "Christine Lagarde a décidé elle-même et elle l’a assumé pleinement, mon rôle personnel dans cette phase là est égal à zéro", martèle Richard, qui souligne, à plusieurs reprises, que c’est bien elle la "juriste professionnelle". L’ancienne patronne du cabinet d’avocats d’affaires américain Baker McKenzie, a été condamnée par la Cour de justice de la République pour "négligence" dans cette affaire.

    Poussé dans ses retranchements par le procureur, qui l’accuse de n’avoir pas su protéger sa ministre ni les intérêts de l’Etat, Stéphane Richard finit par s’énerver. Il ne veut pas payer pour tout le monde, ce n’est pas lui qui a décidé de recourir à l’arbitrage, il n’était ni ministre ni président de la République. "Vous me taillez un costume un peu grand pour moi", lance-t-il aux deux représentants du parquet. "On se demande ce qu’ils ont fait, les politiques dans cette affaire. Ce sont eux qui ont pris la décision, leur responsabilité est en cause." Et le PDG d’Orange de s’interroger également sur l’absence de Claude Guéant, le secrétaire général de l’Elysée, et du conseiller économique François Pérol.  "Pourquoi ne sont-ils pas à côté de moi, il faudra qu’on me l’explique un jour." 

    Challenges

     


  • Commentaires

    1
    Rakia
    Jeudi 21 Mars 2019 à 15:27

    Il s’agissait de 400 millions d’euros, s’ils ne trouve pas de coupable

    ils vont l’inventer et lui faire endosser un costume aussi large que celui 

    d’un clown,bienvenue chez les rapaces ! Pauvre Bernard Tapie en plus de 

    sa maladie,il doit supporter ce monde sans pitié ..!

     

    2
    Jeudi 21 Mars 2019 à 17:19

    on  peut  comprendre  que  sarkosy et  le gouvernement   voulaient remercier Tapie  pour avoir appelé  à voter  pour lui !

     Un sacré  imbroglio

    3
    françoise
    Jeudi 21 Mars 2019 à 17:39

    Tout cela m’indiffère!

    4
    Rakia
    Jeudi 21 Mars 2019 à 18:31

    S’ils ne trouvent pas ,j’ai mangé le ent ( rire) Tu étais secrétaire ,chantou,

    tu es un as de l’orthographe ,tu peux corriger mes bêtises ,s’il te plaît, maîtresse !( rire)

    Un grand merci d’avance,bisous !

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :