• Apprentissage : tensions entre Edouard Philippe et Muriel Pénicaud

    Apprentissage : tensions entre Edouard Philippe et Muriel Pénicaud

    Dans le bras de fer entre le Medef et les Régions, le Premier ministre Edouard Philippe et la ministre du Travail Muriel Pénicaud ne sont pas sur la même longueur d’onde. Une première.

    Entre Matignon et le ministère du Travail, rien ne va plus ou presque. Pomme de discorde : l'apprentissage. Pour la première fois depuis l'élection d'Emmanuel Macron, des divisions apparaissent au sein de l'exécutif. "Le front gouvernemental craque face à la fronde régionale, tacle un membre du gouvernement. On prend le risque de planter la réforme afin de récupérer des alliés potentiels pour La ­République en marche." Le mauvais coup n'est venu ni des ordonnances travail, dont le parcours législatif s'est achevé sans encombre cette semaine, ni des syndicats, mais… du Medef et des Régions! Un scénario que les plus fins observateurs de l'Elysée n'avaient pas forcément pressenti.

    Hervé Morin mène la fronde

    "Ils ont sous-estimé Hervé Morin", juge un responsable patronal. Depuis son élection le 22 novembre à la tête de l'Association des Régions de France (ARF), le président UDI de la Normandie mène la fronde contre le ministère du Travail, qui entend déverrouiller un dispositif qui n'accueille que 10% des 15-24 ans en en confiant les rênes aux entreprises. "Le système Medef-UIMM, c'est la main invisible du marché, la loi de l'offre et de la demande. Il faut un minimum de pilotage public, sinon on va assister à un appauvrissement considérable de l'offre de formation", tempête Morin, qui propose la signature de contrats d'objectifs et de moyens par branches.

    Entre Pierre Gattaz, qui veut un apprentissage cousu main, et les Régions, qui souhaitent préserver l'équilibre de leurs territoires, c'est un dialogue de sourds. Dans les groupes de travail chargés de mener les concertations, la tension était parfois à son comble. "La question du “qui fait quoi” a complètement occulté les autres. La politique a pris le dessus", regrette une participante. Une plénière de restitution se déroulera chez France Stratégie ce mardi. Le rapport doit ensuite être transmis à la ministre du Travail, Muriel Pénicaud. Dans ce dossier devenu poudrière, la partie ne se joue pas là, mais à l'Elysée et à ­Matignon. Les acteurs de cette pièce qui tourne au vinaigre l'ont bien compris. Et profitent des ­désaccords internes entre ceux qui ne veulent pas se mettre les Régions à dos et ceux qui militent pour un système plus agile. Franck Morel, conseiller social à Matignon, Pierre-André Imbert, son homologue à l'Elysée, et Alexis Kohler, le secrétaire général du Château, sont sollicités de toutes parts par des injonctions contradictoires.

     

    "On frôle le ridicule"

     

    Dans son combat, Hervé Morin semble avoir l'oreille d'Edouard Philippe, élu local et soucieux d'asseoir sa majorité dans les territoires, qu'il a vu le 15 janvier. A sa sortie, il criait quasiment victoire. A tel point que, le lendemain, Pierre Gattaz quittait les négociations sur la formation professionnelle. Les réunions des 19 et 26 janvier ont été ajournées. Désormais, ça n'est plus un, mais deux dossiers capitaux pour le gouvernement qui sont plantés. "On frôle le ridicule, les jeunes s'en fichent de savoir par quel tuyau de financement ça passe", fustige Alain Griset, président de l'U2P (qui représente les artisans et professions libérales). Le coup d'esbroufe du président de l'ARF a irrité l'Elysée. "Tactiquement, Morin l'a bien joué, il installe son mandat et au final il pourra toujours dire qu'il a sauvé les meubles", analyse un dirigeant patronal. Plus ou moins acquis à sa cause également, Jean-Michel Blanquer. Le ministre de l'Education nationale ne dispose pas de conseiller spécialisé sur l'apprentissage, mais reste soucieux de préserver les lycées professionnels, gérés par les Régions et qui entrent en concurrence avec les centres de formation d'apprentis (CFA).

     

    Au sein même du patronat, les avis divergent

     

    A l'opposé, Muriel Pénicaud, ancienne DRH, refuse une réformette qui préserverait l'existant. Les 24 et 25 janvier, son cabinet a rencontré le Medef, la CPME et l'U2P. Au sein même du patronat, les avis divergent. L'U2P, qui dispose de CFA interprofessionnels à cheval sur plusieurs branches, est pro-Régions. Tout comme le bâtiment, les chambres des métiers et la FNSEA. Quant à la CPME, plus modérée que le Medef, elle a échangé jeudi avec le Premier ministre. Au CES de Las Vegas, son numéro un, François Asselin, a croisé Hervé Morin. Depuis, il joue les entremetteurs avec Matignon.

    Des deals se dessinent autour des deux points de crispation : le passage à un financement au contrat – en fonction du nombre d'élèves inscrits en CFA – géré par les branches, et la possibilité pour les Régions d'exercer un droit de veto en cas de nouveaux centres. Elles disposeraient librement d'une fraction du financement (5 à 10%) et pourraient bloquer les ouvertures dans un rayon de 30 km autour d'un lycée professionnel. Après un rendez-vous vendredi soir avec l'ARF Rue de Grenelle, la température semble baisser. L'issue, positive, serait proche. Mais l'histoire laissera des séquelles. 

    Le JDD


  • Commentaires

    1
    Lundi 29 Janvier 2018 à 17:40
    Normal que des divergences apparaissent, le mouvement en marche est fait de bric et de broc ! Mais au final on constate que chacun veut surtout préserver son électorat
    2
    françoise
    Lundi 29 Janvier 2018 à 19:15

    Quel sac de nœuds ! Un jour ils s'aiment et le lendemain ils se détestent! Quel bande de guignols et c'est ça qui gouverne!

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